Elle est fascinée par Proust et sa Recherche du temps perdu. Mais Francis Ponge lui irait bien aussi avec son invocation À la rêveuse matière. 

Isabel Cobbi-Callen conjugue amoureusement les traces et empreintes du souvenir avec les explorations délicates qu’elle mène à travers ses matières et textures. En poète sans paroles, elle s’emploie inlassablement, par séquences intimistes ou instants suspendus, à apprêter les restes du temps passé avec les vibrations de cette peau profonde qu’elle travaille en mêlant intimement les techniques (peinture et gravure), les matériaux (pigments et papiers déchirés, teintés et marouflés) et les sollicitations du hasard avec ses propres exigences plastiques.

Chacune de ses œuvres est un concentré d’expérimentation alliant intuition et maîtrise, spontanéité et lente maturation, archaïsme et sophistication. Dédiée à des souvenirs d’enfance partiellement enfouis, des inspirations végétales librement interprétées ou des taches et griffures découvertes sur des murs, la forme s’y efface à demi pour laisser place au silence, à l’émotion, au mystère. Quant à sa palette, entre transparences et opacités, elle se plaît dans des clairs-obscurs et des demi-teintes qui se font invitation aux voyages intérieurs et à la rêverie.

Françoise Jaunin, septembre 2024